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CECI EST UNE PAGE ANTI-PUB

Je vous préviens tout de suite : je ne suis pas publivore, je suis profondément publiphobe. La petite collection de publicités présentée ici n'est donc pas un hommage, elle tente au contraire de démontrer que la publicité est laide, ringarde, malsaine.

LA PUBLICITÉ N'EST PAS L'INFORMATION

Voyez cette publicité d'auto-justification de 1968 : la photo du publiphobe y évoque les expositions vychistes ("Apprenez à reconnaître un mauvais Français à son physique"). L'argumentaire est simple : la publicité rend service au consommateur en l'informant sur les différents produits. Voyez simplement les publicités de la rubrique «Muscles et gonflette»...

Même rebaptisée «publicité», la promotion commerciale n'est toujours que de la stupide réclame : son but n'est pas d'informer, mais de vendre (ce qui est bien souvent incompatible). L'argumentaire de l'exemple ci-dessus est bien sûr vieillot, mais le propos demeure... ainsi les info-merciales (interminables publicités présentées sous forme de reportages), ainsi le mélange de plus en plus sournois entre information et publicité (grâce au poids des annonceurs).

LE PUBLICITÉ N'EST PAS LE REFLET DE LA SOCIÉTÉ

Un argument développé de plus en plus fréquemment par les publicitaires (voyez par exemple l'émission «Culture Pub») : la publicité est le reflet de la société et des mentalités. Il conviendrait donc de s'y intéresser du point de vue sociologique : «regardez la publicité, consommez de la publicité, vous apprendrez qui vous êtes...»

C'est un mensonge : par définition la pub ne peut pas être le reflet de la société. Son unique raison d'être est de générer des envies, et pour cela elle doit montrer un monde «meilleur» (c'est-à-dire où chacun utilise le produit vanté). Si la pub montrait le monde tel qu'il est, elle ne créerait pas de nouveaux besoins, donc elle ne vendrait rien.

Quant aux mentalités, c'est encore pire. La pub n'est que le reflet d'une seule mentalité : individualiste et consumériste. Elle n'est pas l'image des mentalités, seulement elle les manipule et tente de les façonner. Les publicités présentées ici le montrent : entre 1968 et 1974, alors que la société est marquée par la libération de la femme et l'émergence de modèles de vie plus désintéressés, la pub fait encore la promotion du «vrai homme», couillu, dominateur et ultra-compétitif.

LA PUBLICITÉ N'EST PAS UNE CULTURE

(Lorsque j'entends l'expression «culture publicitaire», je sors mon flingue !) La publicité n'est qu'un pillage de la culture et de la création. Elle créé des modes à partir de travaux et des recherches d'artistes qui n'en profitent pas. Ses codes graphiques sont systématiquement copiés sur des travaux datant d'une dizaine d'année.

Voyez la collection montrée ici... les publicitaires se présentaient déjà comme «créatifs» et prétendaient démocratiser la culture. Comparez simplement leurs «créations» avec les oeuvres des artistes des années 60...

LA PUBLICITÉ N'EST PAS UN MAL NÉCESSAIRE

Voilà l'argument massue : la pub est un mal nécessaire. Elle est indispensable au dynamisme des entreprises, mais surtout elle finance la presse, le sport, le divertissement. Elle permet la gratuité de la radio, de la télévision, de l'Internet...

C'est le serpent qui se mord la queue : la publicité n'est pas gratuite, elle est payée par le consommateur des produits annoncés. Elle entre (parfois de manière très importante) dans le prix des produits, une surtaxe en quelque sorte.

Alors non, la pub n'est pas gratuite, elle n'est pas une redistribution indolore des richesses (de l'industrie vers l'information, la culture et le sport), elle est un gouffre à fric qui favorise les géants industriels au détriment des petits, et favorise les monopoles et les amalgames (les annonceurs achètent, au sens propre, les groupes de presse...).

POURQUOI CES VIEILLES PUBLICITÉS ?

Parce qu'elles ont très mal vieilli. Leur laideur, leurs messages débiles, leurs mensonges sont, avec le temps, devenus évidents. Ces pubs ne sont pas «rigolotes», elles sont répugnantes.

Voilà le but de ce «Petit bréviaire de publicités couillues» : si la publicité s'est «modernisée», si ses messages se sont adaptés au politiquement correct, ses moteurs sont toujours les mêmes : du viril avec du poil autour.

Apparemment plus civilisé, le «créatif» publicitaire a toujours l'argumentaire au niveau du caleçon. Le pshhit-pshhit sous les bras fait toujours mouiller les femelles, et la grosse voiture laisse toujours des traces de pneus sur le bitume... Comparez les pubs récentes avec ces vieilleries, vous y trouverez les mêmes codes.

Seule la forme a changé ; le fond, lui, est toujours aussi réac et répugnant. La publicité ne reflète pas les mentalités, elle ne vise qu'à transformer des hommes civilisés en sauvages individualistes, les citoyens en consommateurs.

NB. Les publicités présentées ci-contre ne sont pas modifiées. Ce sont des pub originales publiées dans la presse entre 1968 et 1974.

L'homme, le vrai, est un «vrai fumeur» (Camel), pas une femmelette qui hésite... Pour ceux qui douteraient encore du symbole phallique que sont les cigarettes, la pub PallMall est des plus explicites. Ce qui permet au fumeur, malgré les glaires matinales et l'haleine de cendrier, de tomber les filles.

Remarquez bien que le cancer des poumons est exclusivement «pour hommes». Les femmes ne fument que lorsqu'elles y sont invitées par un mec (un vrai).

«Femme au volant, mort au tournant...» Voilà un slogan que ne renieront pas les publicités ci-dessous... L'auto, c'est pas pour les gamines, c'est pour les hommes (les vrais, encore).

D'abord, attention, la voiture, ce n'est pas pour tous les hommes. Pour piloter une Simca 1000 ou une Ford Escort, il en faut ! Pour foncer pied au plancher sur une «petite route départementale», il faut «une coeur gros comme ça».

Mais si vous êtes un mâle (un vrai), vavavoom ! Les filles ça y va tu peux me croire... «Plus jamais seul» avec un auto-radio ! Là encore il va falloir assurer : si vous faites partie de ces «hommes [qui] ont plus d'exigences à satisfaire», vous saurez «taquiner sa boîte de vitesses», vous saurez «combler ses doubles corps», «satisfaire [son] tempérament»... «A faire pâlir les autres de jalousie» !

Vas-y René, avec le bras sur la portière...

Avant de monter dans son petit bolide, l'homme se fringue. Genre : avec des fringues de mec (on n'est pas des pédés). Ainsi le costume Sullivan «pour les vrais hommes». Chez Hom, on précise la notion : «pour les hommes qui sont des hommes».

Encore plus précis chez Safari, les vrais hommes qui sont des hommes, ce sont «ceux à qui les grandes blondes ne font pas peur».

Finalement, le vrai homme qui est un homme qu'a pas peur des grandes blondes, il les fait toutes tomber, dans sa chemise Broadway. Au passage, remarquez bien que le vrai homme bien dans ses fringues est un gros fumeur (voir ci-dessus).

Le problème du vrai homme qu'est un homme qu'a pas peur des grandes blondes, c'est qu'à force de rouler comme un dingue sur les petites routes, il sue énormément. Et ça, ça fait un peu trop mâle. Alors le vrai homme se met du pschhit-pschhit sous les bras, du sent-bon partout, et se peigne le poil.

Première étape, ne pas se tromper de flacon. Poulidor, qui n'est pas la moitié d'un con, lui, ne se trompe pas : il n'utilise pas les produits de sa femme ; il utilise la laque Gibbs «pour les hommes, les vrais».

Et là, ça ne rate pas, les filles, tu vas voir, vavavoom ! elles tombent comme des mouches... Brut de Fabergé (remarquez l'élégante petite chaîne autour du cou de la bouteille), «les femmes [en] raffolent». Avec Pullman, c'est encore plus efficace : la femme, «dès qu'elle respire cette légère odeur de lavande et de tabac blond, elle ne peut s'empêcher d'être de [votre] avis». Si !

Mais attention, la femme est une proie parmi «les plus dangereuses du monde». Soyez «impitoyables», «cruels» : «rendez les femmes malheureuses». Le genre sadique chez Helena Rubinstein. Si vous êtes plutôt maso, «cravachez-vous» avec Cravache («elles aiment, elles adorent»).

Bon, ça y est... vous avez suivi tous nos bons conseils. Vous êtes un mâle un vrai qui sent bon dans sa voiture. Résultat : vous avez votre femme à vous (une grande blonde qui ne vous fait pas peur). Qu'en faire ? Où la mettre ?

Si vous êtes «cuir», vous pouvez la mettre à genou, à côté de votre fauteuil, tenue en laisse... c'est un genre comme un autre.

Si vous êtes très «boulot-boulot», préférez la femme-meuble de bureau... Fonctionnelle, pratique, moderne, bien conçue. La version la plus ancienne (1972) encombre bien un peu votre bureau, aussi préférez le modèle secrétaire 1973 (remarquez les détails : le jeune femme réajuste ses bas, et les lunettes de son patron sont posées sur le bureau derrière elle - ambiance droit de cuissage).

Si en revanche, côté filles, ça ne va pas fort pour vous, c'est qu'il est temps de travailler votre corps. Avec BullWorker, 5 minutes par jour et «cet été, les filles ne manquent pas !».

Notre conseil : préférez Rolling Sport, il suffit de 2 minutes par jour seulement. Et ensuite, «on vous parle sur un autre ton».

Et si c'est toujours le bide, c'est que vous êtes trop con (ça arrive même à des gens très bien). Dans ce cas «parlez-lui des cours Eurelec... elle vous appréciera».